Sortie le vendredi 23 juin 2023
1. Kinsei
2. Deep Violet Of Gold
3. Living Circle
4. Aestus
5. Tecum
6. Remain
7. Tree Mountain
Pas étonnant qu’il ait fallu 5 ans à Shida Shahabi pour donner suite à son très beau Homes de 2018 : c’est à une véritable refonte de sa musique, passée entretemps par la case bandes originales, que nous convie ici la Suédoise d’origine iranienne révélée la même année par un split EP en trio avec Resina et Emilie Levienaise-Farrouch, ses compagnes de label chez 130701, structure affiliée à Fat Cat et dédiée aux univers d’inspiration ambient ou modern classical.
Entretemps, il y avait eu l’EP Shifts plus dense et arrangé avec la présence enveloppante et capiteuse d’un violoncelle, mais pas vraiment de quoi nous laisser augurer de ces épaisses élégies magnétiques d’où le piano a presque disparu, faisant la part belle aux lignes langoureuses et impressionnistes de contrebasse et de violoncelle nouées en harmonies parfois sismiques et saturées (Deep Violet Of Gold), non sans atomes crochus avec les morceaux les plus amples et monolithiques du superbe Music for Film and Theatre d’Hania Rani. Lorsque les accords de son instrument de prédilection réapparaissent, comme sur les magnifiques Living Circle et Aestus aux choeurs féminins irréels à mi-chemin de la musique sacrée et du soundtrack dark ambient malaisant (à sa voix se joignent alors celles de Julia Ringdahl, de Sara Parkman ou de l’excellente Nina Kinert qu’on avait un peu perdue de vue depuis son remarquable Red Leader Dream), il se contente de donner le tempo et le ton, presque éteint, ne retrouvant un peu de son éclat que sur l’éthéré Remain sans pour autant reprendre l’ascendant sur les textures stratosphériques et enivrantes des nappes ambient et des instruments à cordes frottées.
Quant à Tecum, entre pesanteur des fréquences de la contrebasse et minimalisme stellaire des synthés, il lorgne sur le rétrofuturisme contrasté d’un Ben Chatwin, ouvrant encore le champ des possibles pour celle que l’on avait décidément trop tôt cataloguée en pianiste néo-classique et qui vient de livrer, mine de rien, l’un des disques les plus imposants et fascinants de ce premier semestre.