Sortie le vendredi 15 novembre 2024
1. Esperando por Vocě
2. Rules of the Game (feat. Snoop Dogg)
3. Fire In The Disco
4. فرار کنم - Farrar Konam (feat. Liraz)
5. Nossa Cor (feat. Samantha Schmütz)
6. Human Absence
7. Run (feat. ALA.NI)
8. Spiraling (feat. Bilal)
9. Purification (feat. Laetitia Sadier)
Rien de mieux qu’une compilation preview (soit, sur les 9 morceaux présents, 6 extraits de futurs albums en solo ou collaboration) pour faire un point d’étape sur la carrière assez passionnante d’Adrian Younge, souvent associé en tant que compositeur de soundtracks (des séries "Luke Cage" et "Sugar" au score fabuleux du méconnu long-métrage "Run This Town") à l’ex A Tribe Called Quest, producteur et multi-instrumentiste Ali Shaheed Muhammad, avec lequel il chapeaute également de main de maître la série d’EPs Jazz Is Dead régulièrement plébiscitée en ces pages.
40 articles et fiches de sorties depuis notre chronique de Twelve Reasons To Die produit pour Ghostface Killah en 2013, c’est dire si le bonhomme a été actif et si on l’apprécie. Pour autant, et ce jusque dans le concept des Jazz Is Dead invitant sur chaque volet une ou plusieurs légendes plus ou moins oubliées du genre à jammer avec les deux musiciens, on a toujours senti poindre une certaine dichotomie entre la créativité de Younge et son côté nostalgique voire révérencieux, fortement porté sur l’hommage, que l’on imagine intimement lié à son amour de toujours pour les musiques vintage des années 60/70 (soul, jazz, funk, blaxploitation, musiques de films etc.) dont il cherche depuis ses débuts à reproduire via son label et studio Linear Labs les sonorités atemporelles, drums organiques qui claquent et autres textures analogiques des enregistrements sur bandes, au risque parfois de céder aux gimmicks typiques de l’une ou l’autre époque.
Ainsi en est-il ici du chant de Liraz mixé très en avant sur Farrar Konam comme dans la musique populaire moyen-orientale 70s, de la samba anachronique de Nossa Cor avec une actrice brésilienne au micro, ou des synthés G-funk un brin ringards d’un Rules of the Game avec Snoop Dogg aux orchestrations par ailleurs aussi élégantes que celles de la BO de "Luke Cage", en espérant que leur "album blaxploitation" à venir, Don’t Cry for the Devil, ne s’amuse pas trop à singer les signatures datées du surcoté Dr. Dre. À en juger par Esperando por Você, le 3e opus de la série Something About April devrait pour sa part continuer sans trop de surprise dans la lignée psyché-soul des précédents, si ce n’est pour le chant en portugais justifiant pleinement son inclusion sur ce sampler sous le signe du Brésil. Quant à Fire In The Disco, extrait du futur projet Afrodisco Makossa de Younge, il reprend le genre de choeurs récurrents dans l’afrobeat façon Fela Kuti et saupoudre la recette de quelques blips cosmiques à la Sun Ra, un peu facile pour un tribute à deux des têtes chercheuses les plus singulières de la musique noire des années 70.
Heureusement, Adrian Younge sait aussi s’affranchir de ses modèles, et si David Axelrod demeure une influence prégnante, le classieux Human Absence entre groove au cordeau et arrangements capiteux rétro mais pas trop évoque ses travaux les plus inspirés pour le grand et le petit écran, notamment le susnommé "Run This Town", laissant augurer du meilleur pour YOUNGE, album instrumental enregistré avec un orchestre de 30 musiciens. Run n’est pas mal non plus, offrant un écrin downtempo assez envoûtant à la Parisienne ALA.NI, quelque part entre néo-soul et trip-hop dont on espère qu’il débouchera aussi sur une collaboration en long-format, de même surtout que Purification avec Laetitia Sadier, autre grande adepte de l’atemporalité que ce soit en solo avec ses incursions bossa ou via le rétrofuturisme psyché de Stereolab. En effet, déjà croisée sur deux des meilleurs titres de Something About April II (en duo avec Bilal, dont on retrouve également un inédit ici) et surtout le chef-d’oeuvre Dans Un Moment D’Errance avec Questlove à la batterie sur l’éponyme de The Midnight Hour, la plus Britannique des chanteuses françaises inspire décidément le compositeur/beatmaker et le pousse dans ses retranchements les plus aventureux... et les moins passéistes.