Sortie le lundi 7 juin 2004
1. Knight Errant (feat. Hannah Marcus)
2. A Cold Apple (feat. Hannah Marcus)
3. Wave Generators
4. Magnificence As Such
5. The Neophyte
6. Rosie Ruiz
7. You’ll Never Tame Me (feat. Matmos)
8. Your Neck In The Woods
9. One Way Out Of The Maze
10. Pangolin
11. Hurricane Season (feat. Hannah Marcus & Matmos)
12. Coda (Breathing)
A ceux qui voyaient avant tout en Gastr Del Sol le groupe de Jim O’Rourke, touche-à-tout génial et producteur au nez fin croisé aux côtés de Smog, Wilco (dont le leader Jeff Tweedy et le batteur Glenn Kotche forment également avec lui les passionnants Loose Fur), Sonic Youth, Joanna Newsom, Stereolab ou Beth Orton notamment, il faudra découvrir d’urgence l’entière discographie de son collègue David Grubbs pour réaliser à quel point ce duo culte, inventeur entre autres d’une post-folk cosmique et déstructurée dont l’influence ne cesse de croître (cf. le premier album de Benoît Pioulard l’an dernier), doit tout ou presque à l’univers personnel de cet ancien chicagoan désormais new-yorkais, à l’intensité fourmillante de vie de son maximalisme lo-fi fait d’arpèges électriques toujours au bord de la rupture et de la dissonance, et de rythmiques très free jazz de batterie et percussions (assurées sur A Guess At The Riddle par l’excellent Adam Pierce aka Mice Parade), à sa façon d’esquisser les mélodies, de les dérouler dans un souffle pour chroniquer nos existences en accéléré, à ses plages de piano ambiantes (habillées ici sur deux morceaux par l’électronica discrète et impressionniste du duo Matmos), à son chant éternellement jeune et émerveillé, à ses mélodies vocales, enfin, dont la pureté parvient encore à transcender des chansons qui refusent jusqu’au bout de choisir entre racines traditionnelles et ancrage profondément urbain. Il faut d’ailleurs préciser qu’O’Rourke n’a rejoint Gastr Del Sol, fondé par Grubbs en 1991 avec à ses côtés les futurs Tortoise, Bundy K. Brown et John McEntire, qu’en 1994 pour Crookt, Crackt, And Fly .
Et à ceux qui ne jugent que par Tortoise, justement, il faudra se plonger ans les prémices de l’oeuvre de Grubbs, lequel à la fin des années 80, après avoir inventé le post-hardcore, le math-rock et le grunge avec Squirrel Bait (dont les trois autres membres s’en allèrent ensuite fonder... Slint, tiens donc) dès 1983, mêlait déjà avec Bastro (trio complété par Clark Johnson et... ah ben voilà, John McEntire) expérimentations électriques et free jazz au sein d’un rock déconstruit bardé d’explosions post-hardcore, pour un résultat certes bien plus énergique que le futur post-rock du quintette chicagoan, mais tout aussi novateur et captivant.
En attendant, plonger la tête la première dans ce dernier album en date de la disco pléthorique de David Grubbs (laquelle compte nombre de musiques de films et de pièces expérimentales composées pour des installations d’art contemporain) sera déjà un bon début, d’autant qu’il s’agit tout à la fois du plus abordable et de l’un des plus aboutis jamais enregistrés par ce musicien majeur de notre époque, génie discret au talent inépuisable qui tente de répondre à sa manière, album après album, à la grande charade de la vie.